Mois du genre 2021
Université d'Angers / Frac Nouvelle Aquitaine MÉCA
Pour la troisième année consécutive, TALM-Angers s'associe au Mois du genre.
Imaginée par le programme de recherche GEDI (GEnre et DIscriminations sexistes et homophobes) et la mission Égalité de l’UA, cette manifestation du mois de mars porte des événements gratuits et ouverts à toutes et à tous, permettant les échanges entre le grand public, les scientifiques et des artistes.
Cette année, Clovis Maillet, professeur de TALM-Angers propose en partenariat avec le Frac Nouvelle Aquitaine MECA et l'université d'Angers 3 conférences en ligne, dans le cadre de cet évenement.
Lundi 8 mars
Danse, genre et féminisme – Conférence de Pauline Boivineau à 16h
La danse partage les préoccupations des militantes féministes à l’égard des problématiques d’identité, de sexualité, d’émancipation, de déconstruction du genre et des binarismes, de recherche universaliste ou de féminitude. L’année 1968 marque un tournant social qui concorde avec celui de la danse, y compris d’un point de vue politique. L’art chorégraphique prend son essor au moment où la seconde vague féministe arrive sur le devant de la scène.
En 50 ans, les rapports qu’entretiennent la danse et le féminisme sont reconfigurés, ce qui permet d’évaluer les influences réciproques et de postuler l’existence d’une danse féministe. La confrontation aux langages des chorégraphes masculins permet de comprendre les constructions genrées et leur potentiel de remise en cause du système hétéronormé et androcentré. La généralisation de la nudité et la queerisation de la danse soulèvent l’enjeu du passage de la transgression du genre à sa subversion. Il s’agit de comprendre comment la troisième vague féministe, plus ouverte à la dimension culturelle et intersectionnelle, permet à la danse d’être féministe.
Pauline Boivineau est maîtresse de conférences en arts du spectacle à l’Université Catholique de l’Ouest et chercheuse associée au laboratoire TEMOS. Elle a soutenu une thèse en 2015, sous la direction de Christine Bard (Université d’Angers), et a participé à la Nouvelle histoire de la danse en Occident de la préhistoire à nos jours, sous la direction de Laura Cappelle (Seuil 2020).
Belle et rebelle : Joséphine Baker – Conférence de Marie Canet à 18h, proposée dans le cadre de la co-écriture Vivantes du Frac Nouvelle Aquitaine MÉCA !
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Figure marquante de l’histoire du XXe siècle, Joséphine Baker (née en 1906 à Saint-Louis Missouri et décédée en 1975 à Paris) est une performeuse africaine-américaine issue du vaudeville et du music-hall. Arrivée à Paris en 1925 à l’âge de 19 ans, elle danse au sein de la Revue Nègre. Dans la « Danse sauvage » qu’ils performent au théâtre des Champs-Elysées, Joséphine Baker et son partenaire sur scène, Joe Alex, sont à moitié nus et portent des plumes à la taille, aux poignets et aux chevilles. Ils incarnent, pour l’audience parisienne, une sorte d’altérité exotique, une innocence primitive et énergique, sexuellement libérée.
Joséphine Baker arrive à Paris au moment de l’apogée du mouvement Art déco et en pleine « vogue nègre », alors que se confirment les ambitions structurelles et idéologiques du modernisme architectural à l’esthétique épurée, ainsi que les ambitions coloniales de l’Europe vers les pays d’Afrique. Joséphine Baker apparaît comme une figure complexe, emblématique des contradictions de la modernité vis-à-vis des questions raciales, et des enjeux d’émancipation liés au genre et à la sexualité.
Joséphine Baker est également importante dans le contexte de la région Nouvelle-Aquitaine où elle a longtemps résidé. Propriétaire du Château des Milandes en Dordogne, elle bâtit son projet utopique de « Village Monde » dédié à la fraternité entre les peuples.
Mardi 9 mars
Les genres fluides au Moyen âge – Conférence de Clovis Maillet à 16h30
Pouvait-on changer de genre au Moyen Âge ? Vivre en homme et devenir sainte ? Naître fille et finir chevalier ? Changer d’habits comme d’identité ? L’expérience des transidentités, les disjonctions entre le sexe assigné à la naissance et le genre d’identification, apparaissent souvent comme un problème contemporain qu’auraient méconnu les temps pré-modernes. Pourtant l’époque médiévale où l’église chrétienne constituait l’institution dominante, a été l’objet d’expériences sur le genre d’une grande complexité.
En remontant de la vie de Jeanne d’Arc aux personnages qui lui ont servi de caution pendant son procès de réhabilitation, saint·es ayant changé de genre au haut Moyen âge, on peut faire une anthropologie historique du genre capable de réajuster l’histoire des transitions de genre et des transidentités. L’historiographie avait depuis les années 1980 usé du mot travestissement qui n’existait pas au Moyen âge, puisqu’on note son apparition au XVIe siècle. Les médiévaux disaient « vivre comme un homme », « se dire homme » alors qu’on était une femme. On peut lire dans la vie d’Hildegonde de Schönau l’expression littérale « transitionna de genre » : genus transivit.
En six chapitres, l’ouvrage Les genres fluides, de Jeanne d’arc aux saintes trans présente des cas d’école permettant de repenser les genres dans le monde chrétien médiéval, au plus près des textes et des images. Jeanne d’Arc, Silence, Hildegonde-Joseph, Eugénie-Eugène, Marina-Marinos, Thècle, en sont les héro·ïnes.
Clovis Maillet est professeur d’histoire et théorie des arts à l’ESAD TALM-Angers, et auteur de La parenté hagiographique (XIIIe-XVe siècle)(Brepols, 2014), Les genres fluides, de Jeanne d’arc aux saintes trans (éditions Arkhê – 2020). En duo avec Louise Hervé, iels ont publié L’Iguane(Thalie Lab, Bruxelles, 2018), Spectacles without Objects (Pork Salad Press, Aarhus, 2014), Attraction étrange (JRP Ringier, Genève, 2013).