Conférence de Sylvie LINDEPERG - professeure d’histoire à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Nuremberg, la bataille des images
Conférence proposée par Sandra Delacourt et Chloé Quenum, professeures TALM-Tours, dans le cadre du cycle de conférences "Ce qui nous lie".
Cycle de conférences "Ce qui nous lie"
Le temps présent semble continuellement nous presser à énoncer notre appartenance. Mais comment aujourd’hui nommer nos manières d’appartenir au monde ? À quelles échelles se mesurent nos attaches, nos convictions de faire partie intimement de quelque chose, d’être chez soi quelque part, de faire corps avec des autres ? Au cours de ces conférences, nous tenterons d’observer de plus près comment, à travers la fiction, le cinéma, l’histoire ou les arts, s’inventent des régimes de prise de parole cherchant à dire l’enchevêtrement de nos enracinements, la pluralité des positions où s’élaborent nos pensées, nos imaginaires, nos identités. Faut-il (s’)appartenir ? Nommer ce à quoi l’on appartient ? L’art et la fiction peuvent-ils engager autrement nos vies dans ce à quoi l’on tient ?
Nuremberg, la bataille des images
Fin 1944, les Alliés décidèrent d’un procès exemplaire contre les criminels de guerre nazis qui s’ouvrira à Nuremberg en novembre 1945. Les Américains, qui entendaient faire de ce jugement un grand « show médiatique », en furent les maîtres d’œuvre. La Field Photographic Branch de l’OSS (ancêtre de la CIA), dirigée par John Ford, fut chargée de rassembler des images témoignant du plan d’invasion nazi et des crimes contre l’humanité. Budd Schulberg, le futur scénariste d’Elia Kazan, parcourut toute l’Europe à la recherche de ces précieux fragments de pellicule, tandis qu’on agençait la salle d’audience du palais de Justice en vue du filmage d’un procès qui dura dix mois et vit les équipes de tournage des Alliés se livrer concurrence pour offrir au monde le premier documentaire sur Nuremberg. C’est l’histoire de la mise en scène de ce « procès-spectacle », des folles ambitions déçues des Américains et de leur bataille de l’image perdue contre les Soviétiques qui est ici racontée.
Sylvie LINDEPERG
professeure d’histoire à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Sylvie Lindeperg est historienne, professeure d’histoire du cinéma à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ses recherches portent sur les liens entre le cinéma, la mémoire, l’histoire, avec un tropisme particulier pour la Seconde Guerre mondiale. Sylvie Lindeperg a écrit et co-dirigé une douzaine d’ouvrages. Elle est notamment l’auteure des Écrans de l’ombre (1997 et 2014), de Clio de 5 à 7 (2000), de Nuit et Brouillard, un film dans l’histoire (2007), de La Voie des images (2013), d’A qui appartiennent les images, avec Ania Szczepanska (2017), de Nuremberg, la bataille des images (2021). Ses ouvrages ont été traduits en plusieurs langues, tout comme ses nombreux articles publiés dans une vingtaine de pays. Nuit et Brouillard, un film dans l’histoire a inspiré le documentaire de Jean-Louis Comoli Face aux fantômes en 2008 ; il a fait l’objet d’une adaptation théâtrale de Nalini Menamkat à la Comédie de Genève (Olga, un regard, 2012). Ses livres Les Écrans de l’ombre et La Voie des images ont été portés à l’écran par Ginette Lavigne dans Traces filmées de la Résistance en 2015. Sylvie Lindeperg dirige, à l’Université Paris 1, le Centre d’études et de recherches en histoire et esthétique du cinéma (CERHEC). Elle assure la co-direction scientifique du programme européen de recherche « Visual Culture of Trauma, Obliteration and Reconstruction in Post-WWII Europe » (VICTOR-E). Elle a fondé en 2003, avec Christa Blüminger, Michèle Lagny et Sylvie Rollet, le groupe de recherche « Théâtres de la mémoire ».