Stætionary
David Kidman, professeur de cinéma et vidéo à l’École supérieure d’art et de design TALM-Tours, accompagne des élèves de TALM-Tours et étudiants de Séoul, à monter une exposition dans le cadre du projet Stætionary en partenariat avec Dongguk University (Séoul, Corée du Sud).
Stætionary, présente les œuvres de 22 étudiants sous la coordination et la curation des cinéastes et professeurs David Kidman et Pip Chodorov. Cette exposition collective dynamique réunit des étudiants de l'Université Dongguk de Séoul, en Corée du Sud, et de l'École supérieure d'art et de design TALM de Tours, en France.
Précédemment exposée à la Kote Gallery de Séoul en décembre dernier, et à la Film Gallery de Paris, l’exposition est visible à galerie MAME de Tours, du 31 janvier au 26 février 2025. Ces trois expositions Stætionary font partie d'un programme d'échange collaboratif entre TALM-Tours et l'Université Dongguk.
Présentation du projet Stætionary
Ce projet s'inspire d'un constat qui peut être fait par tout le monde ; ce qui est considéré comme la pratique du cinéma (et plus encore celle de la vidéo) repose sur l'utilisation de matériel de bureau. L'intention, pleine d’espoir, de ce projet est de s’en servir comme moyen de déconstruire les hiérarchies de production pour des projets artistiques de l’image en mouvement, même arrêtée, dans un parallèle discrépant avec la façon dont ces objets ont redéfini l'environnement de travail.
Les ordinateurs utilisés pour monter, les téléphones pour filmer, les projecteurs utilisés pour diffuser des médias numériques, tous sont conçus comme des machines pour travailler au bureau. On est loin de l'exclusivité du matériel cinématographique utilisé autrefois, inaccessible et très coûteux, dont la mise en place nécessitait une grande expertise technique. Même s'il existe encore des moyens coûteux qui exige un savoir technique accru pour réaliser des films et des vidéos utilisés par les « professionnels », les moyens de production aujourd’hui sont de plus en plus régis par l'utilisation du code binaire.
L’idée et l’idéal du tout numérique, que ce soit au cinéma ou dans d’autres formes d’art (qui semblent toujours illustratives), a un effet aplatissant sur la perception de ce qu’est ou qui peut être l’art. Le marché des non fungible tokens est d’une confusion délirante en ce qu'est de l'art et tout fondement conceptuel perçu étant tout à fait absent. La nature reproductible des objets du monde de l’art est quand même assez ancienne, ayant été inhérente non seulement à la photographie, mais aussi à la lithographie, à la sculpture, etc. En quoi sont les NFT différents ?
L'histoire du cinéma est aussi l'histoire de l'utilisation de l'image animée à des fins d'analyse et de pratique, depuis la chronophotographie d'Edweard Muybridge ou d'Etienne-Jules Marey en passant par l'utilisation par Lillian Moller-Gilbreth et Frank Bunker des caméras et des capteurs à partir de 1914 afin de déterminer la position physique idéale du travailleur pour l'accomplissement de ses tâches. Leur travail n’est pas loin, conceptuellement, de l’utilisation de la capture de mouvement pour produire le cinéma skeuomorphe d’aujourd’hui, sauf qu’ils l’ont utilisé à des fins d’analyse, alors que l’analyse du cinéma skeuomorphique sert à révéler une image de ce qui aurait été. Le simulacre, cette image d’un objet qui n’a jamais existé postulée par Baudrillard est l’outil du cinéma d’aujourd’hui.
Pour illustrer le type de travail possible, je travaille depuis un certain temps sur les possibilités de Stætionary, en utilisant des scanners et des téléphones, des codes et des textes en conversation avec les objets palpables de la pellicule, développée et copiée, montée et occasionnellement abusée. Cela a également été pour moi le moyen de reconsidérer la relation entre les œuvres produites dans le passé, aussi bien les miennes que celles des autres, et leur influence sur la théorisation possible de ce qu'on appelle, au sens large, le cinéma. J'ai repris les travaux qui m'ont permis de trouver des méthodes d'expérimentation, que ce soit avec l'image animée ou son contenu narratif. Cela m'a également aidé à redéfinir ma position dans un monde où les certitudes de la théorie du cinéma ne tiennent plus ; le théâtre obscur n'est plus le lieu principal de projection du cinéma, la fragmentation de l'idéologie et de toute position philosophique supprime le sentiment de l’expérience contemporaine commune vécue. Y a-t-il toujours de la place pour un modèle théorique unique, même au sein du travail d’un artiste individuel ?
Ces questions ont éclairé les pièces statiques et en mouvement que j'ai réalisées ces dernières années. Je pense que trouver un lieu de discussion sur cette incertitude dans les ateliers serait un précieux moyen de briser les hiérarchies entre l'enseignant et l'enseigné, ce qui me semble essentiel pour trouver de nouveaux terrains de recherche en tant qu'artiste, que ce soit techniquement ou étudiant ou un enseignant.
- David Kidman, professeur à TALM-Tours
Artistes participants :
- Elhia Mortier (élève en 3e année option Art à TALM-Tours)
- Axèle Huchet Lamotte & Yvanh Pommarath (étudiants de Dongguk University)
- Solène Allard--Raynaud & Hewon Park (duo d’étudiants français/coréens)
- Subin Han & Hyeongyeong Kim (étudiants de Dongguk University)
- Kaya (élève en 3e année option Art à TALM-Tours)
- Suhyun Jeon (étudiant de Dongguk University)
- Yunyoung Jang (étudiant de Dongguk University)
- LAZYVIDEO (Ji-hyang Kim, Sue-min Shin & Hae-jin Lee) (étudiants de Dongguk University)
- Nayeon Lee & Wonjae Ha (étudiants de Dongguk University)
- Boyoon Choi (étudiant de Dongguk University)
- Marie Dubois (diplômée TALM-Tours en 2018)
- Médéric Boutin (étudiant de Dongguk University)
- Meiyi Luo (étudiant de Dongguk University)
- Minkyung Lim & Chan Kwak (étudiants de Dongguk University)
- Killian Joseph Fullam (étudiant de Dongguk University)
- Pip Chodorov (professeur à Dongguk University)
- David Kidman
Commissaires de l’exposition : David Kidman & Pip Chodorov