L'unité de recherche : Le Laboratoire des intuitions
Le Laboratoire des intuitions, programme financé par le ministère de la Culture, est une plateforme pluridimensionnelle, constituée d’artistes et de théoricien·nes évoluant dans de nombreux champs d’expérimentations et de connaissances, susceptibles de construire des liens dynamiques entre les formes de pensée, à travers l’art, la philosophie, la sémiologie, les mathématiques, la physique, etc.
Le Laboratoire des intuitions a pour double objet l’analyse des pratiques de dessin, de représentation dans tous les champs du savoir et la tentative d’élaborer avec les artistes de nouvelles pratiques dynamiques de mise en œuvre du projet, en considérant que ceux-ci ont des intentions d’écriture propres au développement des formes (la transcription ou l’écriture de l’espace-temps de la performance par exemple ou, autre exemple, le diagramme dans sa phase image de pensée versus le diagramme dans sa figure de démonstration lors d’une conférence). Ce programme propose d’interroger la notion d’intuition dans différents domaines du savoir (y compris les sciences physiques et mathématiques), d’évoquer les constructions diagrammatiques partagées entre les pratiques artistiques, philosophiques, scientifiques et d’exposer formes et espaces singuliers à partir de cet observatoire des nœuds théorie/pratique, démontés et réinventés sans cesse à travers le prisme de l’art.
De l’art à la physique théorique en passant par la philosophie, les sciences sociales ou les mathématiques, ces liens se dessinent en partie à la main. Ce sont en effet les pratiques graphiques qui accompagnent, suscitent, signalent ou modélisent la pensée qui intéressent en priorité le LDI. Le schéma, le diagramme, le croquis, l’esquisse, le bout de nappe crayonnée ne sont-ils pas le lieu d’un langage commun où la pensée se spatialise et se donne à voir, dans la médiation instantanée d’un trait, dans le geste synthétique qui saisit sans délai, qu’il s’agisse de donner forme visuelle à un système théorique ou de réfléchir un dispositif d’exposition ?
Enjeu pour l’art comme pour la science : quand un artiste se demande dans quelle mesure l’expérience située d’une forme peut avoir un rapport avec ce que nous savons scientifiquement de l’espace et qu’il interroge le physicien à propos de cette apparente incommensurabilité, les deux finissent par dessiner ensemble. Plusieurs expériences conduites ces dernières années par le LDI en viennent à ce constat : remonter ou redescendre au stade de l’intuition ne doit pas nous engager dans une recherche en matière de théorie de la connaissance, de sciences de l’esprit ou de psychologie cognitive. Il s’agit plutôt de repérer un plan pratique commun où la pensée, quelle qu’elle soit, se découvre visuellement comme forme en mouvement et devient par le regard le moteur d’une nouvelle dynamique de pensée.
Si le LDI décide d’engager à présent une recherche systématique sur les pratiques graphiques de pensée, c’est que celles-ci se révèlent être chaque fois de véritables laboratoires pour l’intuition : c’est là que l’hypothèse ou l’évidence sentie, que la connaissance non encore démontrée ou démontrable se met à l’épreuve, s’élabore et trouve visuellement le langage de sa propre réflexivité et de son échange. C’est aussi le premier test des résultats d’un calcul : la vérité résistera-t-elle à son image, à sa traduction dans le geste graphique ? Que penser à partir de cette situation de la pensée ?