La voix des étudiantes aux journées européennes du patrimoine
L'artiste Noémie Sauve, professeure de dessin à TALM-Le Mans, vous accueille dimanche 22 septembre au musée de Tessé pour découvrir les œuvres de cinq étudiantes, réalisées dans le cadre de l'Atelier de Recherche et Création Muses Musées.
Présentés depuis le 27 août dernier, les travaux de Anna Cainjo, Maelle Ledauphin, Yvanna Bruneau et Eponine Jean entrent en résonnance avec les différentes collections conservées par les musées du Mans :
"Ce projet de longue durée, composé de plusieurs visites, déambulations libres et rencontres avec des professionnels des musées, a donné l'occasion pour ces futures artistes de cibler des œuvres, exposées ou en réserves, qu’elles trouvaient inspirantes. Après plusieurs mois de travail, elles en livrent une interprétation contemporaine, à la lumière de leurs sensibilités et de leurs questionnements au travers d'installation in situ.
Diverses techniques, allant de l’installation à la céramique, en passant par le dessin, conduisent à porter un nouveau regard sur les collections permanentes."Musées du Mans
Détail des œuvres
Anna Cainjo
Microcosmes fossiles : capturer la subtilité
2024
Ce projet vise à capturer la beauté et les détails fascinants des trésors géologiques et paléontologiques exposés au musée. À travers une série de petits dessins minutieusement réalisés, je souhaite offrir une nouvelle perspective sur ces objets naturels, en révélant les textures, les formes et les particularités qui font leur singularité.
Chaque dessin sera une invitation à découvrir de plus près les richesses des fossiles, mettant en lumière les nuances et les détails souvent invisibles à l’œil nu. Le petit format permet une approche intime et détaillée, facilitant l’observation minutieuse des textures et des formes spécifiques. Cette précision permet de représenter fidèlement les caractéristiques uniques de chaque fossile ou pierre, souvent trop subtiles pour être perçu sur des grands formats.
Papier 180g
Maelle Ledauphin
Pièce à conviction
2024
Les collections du musée présentent des artefacts archéologiques laissant entrevoir la présence des corps qui les ont activés, et dont les usages peuvent sembler énigmatiques. Ainsi s’opèrent des jeux de mise en scène imaginés afin de combler ces zones de mystère.
Lors d’une visite dans les réserves, j’ai été saisie par le rituel de monstration de ces dernières ainsi que par la possibilité de les tenir en main, en portant des gants blancs de protection. C’est comme si ces deux gants blancs créaient une distance avec l’arme, ici Pièce à conviction, car nous tenons, dans le cas des armes trouvées sur des champs de bataille, des armes qui ont tué. J’ai cru à tort qu’une des épées avait été trouvée sur le site de la bataille du Mans de 1793. J’ai donc décidé de la représenter embrochant des chevaux, soldats et civils du tableau de Jean Sorieul (1823-1871).
Pastel gras, crayons de couleur et graphite sur papier
Œuvres ayant inspirées ce dessin :
- Sabre (supposé à tort de la bataille du Mans), conservé dans les réserves,
- Jean Sorieul, La Bataille du Mans, 1852, présenté au début du parcours permanent,
- Sarcophage mérovingien au couvercle inscrit, ayant servi à une recluse puis à un tailleur de pierre Ma(thieu) Leperier, calcaire, VIIe siècle, Le Mans, ancienne église de Gourdaine
Maelle Ledauphin
Édition rassemblant plusieurs croquis
Entre 2022 et 2024
Après ma découverte du tire-lait, j’en eus une fascination croissante tant sa forme et son usage semblent évidents et intelligents. Il nécessite seulement l’énergie corporelle, fait preuve d’économie de moyen dans la forme et les matériaux utilisés et offre la possibilité d’être utilisé en biberon. Cet objet reste cependant sujet à interrogation.
Longtemps considéré comme un biberon, sa vocation de tire-lait a été proposée plus récemment suite à une expérimentation contemporaine sur une jeune maman allaitante. Néanmoins, la taille du bec relativement courte interroge sur la réelle fiabilité de cette hypothèse. Le plus fascinant et évocateur dans cet objet est le fait qu’il contienne la forme archaïque du tire lait contemporain. Pourtant, ce dernier est symptomatique de la manière protocolaire dont ce geste a été intégré aux organisations contemporaines.
Impression sur papier 2024
Œuvre ayant inspiré ces croquis :
- Tire-lait, Ier-IIIe siècle après J.-C
Yvanna Bruneau
La pierre avant d’être une forme est une matière
2024
Regarder l’extérieur pour imaginer l’intérieur
2024
L’inscription votive à Serona m’a tout de suite posée question par sa masse imposante et son dispositif scénographique. Posée sur un socle contre le mur, les faces ne sont pas toutes visibles. Nous comprenons par le dispositif lumineux de l’installation scénographique, que l’accent est mis sur l’inscription figurant sur la pierre.
Cette écriture permet ainsi de déduire et situer ce fragment dans l’histoire. La lumière révèle aussi des contrastes entre les différents côtés. Chacun révèle différents traitements de la pierre. Les dessins présentés sont des tentatives de dissection de la pièce pour ainsi révéler ses différents aspects (lisse, rugueux…), sa structure et ses composants.
Dessin
Yvanna Bruneau
D’après l’observation de l’amphore gauloise à pied et de la cruche à une anse cannelée, panse globulaire et lèvre à bec pincé
2024
De nombreuses jarres, vases, récipients sont exposés au sein du musée. Ces objets ont chacun leur spécificités et usages. Leur procédé technique nous communique des informations sur un territoire et une époque. D’un point de vue archéologique, les productions en série d’un objet permettent de recouper les informations, de trouver une histoire commune et de déduire ainsi une vérité. La céramique reprend les caractéristiques des formes, textures et épaisseurs de l’amphore gauloise à pied, et de la cruche à une anse cannelée, panse globulaire et lèvre à bec pincé.
Afin de montrer la diversité des céramiques présentes sur le territoire local, les trois entrées tubulaires ont différentes couleurs correspondant à différents types de céramique (sigillée, commune) et la fumigation de la pièce n’est sans rappeler la céramique terra nigra ou « fumigée ». La fumigation peut rappeler aussi les traces d’altération noires observées sur la cruche.
Céramique
Eponine Jean
Translucide
2024
Translucide est une œuvre innovante et écologique qui transforme les déchets de l’industrie optique en une représentation artistique des couches de restauration des peintures sur toile. En utilisant de l’acétate de cellulose, un matériau récupéré des rebuts de lunettes, j’ai créé une pièce qui fusionne durabilité et esthétique.
Cette matière, connue pour sa transparence et sa malléabilité, a été fondu pour évoquer les multiples strates de la conservation des œuvres d’art. Chaque plaque symbolise une étape du processus de restauration, reflétant la complexité et la délicatesse nécessaires pour préserver l’histoire et la beauté des peintures anciennes. Les nuances translucides invitent le spectateur à réfléchir sur l’importance de la conservation et du recyclage. En réutilisant des matériaux destinés à être jetés, elle souligne l’harmonie possible entre l’art et la durabilité, montrant comment les déchets peuvent être transformés en éléments de création significatifs. Mon inspiration principale vient de Klari Reis.
Plaques d’acétate de cellulose recyclée issue des rebus de l’industrie créant nos lunettes.