Le serpent noir, Cécile Hartmann
" Le Serpent Noir a été tourné en mai 2019 sur la route du pipeline géant Keystone XL à travers les anciens territoires Sioux des Grandes Plaines. La caméra remonte le flux souterrain du pipeline et les courants des multiples rivières, Missouri, Médecine, Athbasca, qui nourrissent la terre et ses habitants, jusqu’aux immenses exploitations de sables bitumeux au cœur de la forêt boréale. À la frontalité majestueuse des paysages, succèdent des vues cellulaires de la terre ouverte et contaminée par les extractions. Dans les couches invisibles du sol résonnent des voix qui semblent dialoguer : spectres, nappes d’eau, fossiles animaux, machines. Ce qui a été profané se réveille...
Inspiré par la prophétie du Serpent Noir révélée par les peuples Sioux Lakotas dans les années 1930, le film actualise cette vision prophétique des premiers habitants de l’Amérique dans les enjeux écologiques actuels: viendra un serpent noir qui envoûtera les hommes et dévorera la terre. Par un décentrement radical du point de vue anthropocentrique, le film donnera la parole aux formes de vie non humaines : objets, rivières, végétaux, minéraux. "
Cécile Hartmann, professeure à TALM-Tours, présente au centre d'expositions Le Commun, à Genève, son oeuvre Le serpent noir dans le cadre du programme d'ateliers et de performances 1000 écologies organisée par Anna Barseghian :
" Dans un élargissement spectaculaire du champ d’action de l’écologie, il existe désormais des écologies de l’esprit, de l’information, des sensations, de la perception, du pouvoir, de la participation, du social, du politique... 1000 écologies. Cette prolifération n’est pas simplement une extension métaphorique de l’écologie naturelle, elle reflète surtout l’imbrication profonde d’éléments naturels et technologiques dans les environnements que nous habitons.
La principale approche des 1000 écologies passe par le motif de l’échafaudage. Un échafaudage est une construction temporaire constituée de ponts, de passerelles ou de plates-formes. Il permet l’accès d’un bâtiment à édifier ou à réparer. L’événement sera comme un échafaudage qui s’érigera depuis l’espace du Commun et tissera des
trames unissant les champs culturels et ceux qui traitent avec les phénomènes naturels.
Dans ces récits, questionnements et pratiques autour des multiples écologies, l’échafaudage permettra de bâtir des passages vers les espaces du possible. Quand la construction est terminée, on peut retirer les échafaudages et retrouver notre liberté de mouvement.
Quelles sont ces écologies pratiques et politiques, ces relations multiples pour ouvrir le réel à des devenirs possibles ? ".